Recruter un stagiaire devient de plus en plus encadré et source d'obligations... et d'amendes !
Nous n’en sommes pas à la première réforme concernant les stages, rappelez-vous déjà
En 2008, 2010, et en 2011 avec la loi Cherpion !
Nous voici en 2014 avec son lot de nouveauté... décryptage !
Ce qui nous vaut ces modifications ? La loi du 10 juillet 2014 (JO du 11). Cette loi s’applique pour les conventions de stage signées à partir du 1er septembre 2014.
C'est bien d'encadrer les stages et de rappeler que ce n'est pas un emploi, néanmoins cela devient de plus en plus contraignant pour les entreprises.... et les écoles.
Ce qui reste immuable :
- le stage n'est pas un emploi : interdiction formelle d’embaucher un stagiaire (tout comme un intérimaire)à un poste qui nécessite une personne à temps plein, afin d’éviter un CDI, qui reste le Graal pour bon nombre de personnes….!
- chaque stage doit toujours donner lieu à la conclusion d'une convention tripartite signée par le stagiaire, l'organisme et l'établissement d'enseignement. Ladite convention précisera, en particulier, les compétences à acquérir ou à développer durant le stage et la manière dont ce temps s'inscrit dans le cursus de la formation
- Le stage s'inscrit nécessairement dans un cursus scolaire ou universitaire.
- l'organisme d'accueil (entreprise, association, etc.) doit désigner un tuteur
- La durée maximale des stages est toujours de 6 mois.
- L’entreprise doit toujours respecter un délai de carence entre 2 conventions de stage sur un même poste, égal au tiers de la durée du stage précédent (délai de carence qui n'est pas applicable si le stage précédent a été interrompu à l'initiative du stagiaire)
- stagiaires bénéficient toujours des mêmes protections que les salariés contre les discriminations ainsi que les harcèlements moral et sexuel
- Les stagiaires ont toujours accès aux activités sociales et culturelles du comité d'entreprise comme les salariés
Stage ou emploi ? Un choix à faire !
Le stage n'est toujours pas un emploi et pour appuyer cela, cette nouvelle loi l’explique encore plus précisément :
- Les stages se définissent comme des périodes temporaires de mise en situation en milieu professionnel. Durant ces périodes, l'élève ou l'étudiant acquiert des compétences professionnelles et met en œuvre les acquis de sa formation en vue de l'obtention d'un diplôme ou d'une certification et de favoriser son insertion professionnelle. Le stagiaire se voit confier une ou des missions conformes au projet pédagogique défini par son établissement d'enseignement et approuvées par l'organisme d'accueil (c. éduc. art. L. 124-1 nouveau, al. 3).
A contrario, le texte prohibe le recours aux stages ayant pour objet :
- d'exécuter une tâche régulière correspondant à un poste de travail permanent ;
- de faire face à un accroissement temporaire de l'activité de l'organisme d'accueil ;
- d'occuper un emploi saisonnier ;
- de remplacer un salarié en cas d'absence ou de suspension de son contrat de travail.
Ce n’est pas nouveau, mais c’est rappelé, et si l’inspecteur ou le contrôleur du travail qui constaterait qu'un « véritable » poste serait pourvu par un stagiaire doit désormais en informer le stagiaire, l'établissement d'enseignement dont il relève, ainsi que les institutions représentatives du personnel de l'organisme d'accueil, dans des conditions à fixer par décret (c. trav. art. L. 8223-1-1 nouveau).
Pour éviter la confusion, toute personne ou tout organisme qui publie, pour son compte ou celui d'autrui, des offres de stage sur Internet est tenu de les distinguer des offres d'emploi qu'il propose et d'en assurer le référencement spécifique dans ses outils de recherche (loi 2014-788 du 10 juillet 2014, art. 1-IV).
Au menu de cette année :
- nouveaux droits pour les stagiaires : la reconnaissance de certaines autorisations d’absence prévues par le Code du travail (maternité, paternité, adoption), une inscription des stagiaires dans une partie spécifique du registre du personnel, l’accès à la cantine de l’entreprise.
- 2. nouvelles sanctions en cas d’infraction de l’entreprise d’accueil
- renforcement de la dimension pédagogique du stage : un accompagnement de l’école dans la recherche de stage, le suivi des stagiaires par un tuteur enseignant et l’encouragement des stages à l’international.
Afin d’éviter les détournements auxquels procèdent certains organismes, en « vendant » des conventions de stages sans contenu réel de formation, il est envisagé un volume minimal qui pourrait se situer en 150 h et 200 h par an (rapport Sénat n° 458, p. 35), en attente de décret.
1 - Les nouveaux droits pour les stagiaires
La gratification des stagiaires
La gratification minimale est augmentée. Aujourd’hui, le montant de cette gratification est fixé par un accord collectif (convention de branche ou accord professionnel étendu). A défaut de dispositions conventionnelles, le montant minimum de la gratification perçue par le stagiaire est de 12,50 % du plafond horaire de la Sécurité sociale. L’indemnité de stage 2014 minimum est donc toujours de :
(23 x 12,5 %) x (35 x 52 /12) = 436,05 euros pour 151,67 heures par mois.
Pour les conventions signées à compter du 1er septembre 2015, le montant minimum sera de 15 % du plafond horaire de la Sécurité sociale : (23 x 15 %) x (35 x 52 /12) = 523,25 euros pour 151,67 heures par mois (soit + 87 euros). Cet exemple qui se base sur le plafond de la Sécurité sociale 2014.
Cette hausse ne s’appliquera qu’aux conventions de stage signées à compter du 1er septembre 2015.
Le Gouvernement a annoncé que cette hausse se ferait en 2 étapes. Le décret d'application de la loi devrait prévoir une augmentation progressive :
- + 43,5 euros à la rentrée 2014 ;
- + 43,5 euros à la rentrée 2015.*
Si un stage d'une durée initiale inférieure à 2 mois vient à dépasser cette durée, l'employeur doit effectuer un « rattrapage », car la gratification est due depuis le début du stage.
Mais encore…
Les stagiaires se voient accorder le droit à des congés d'une durée équivalente à celles prévues en faveur des salariés en cas de grossesse, de maternité, d'adoption ou de paternité
Quelle que soit la durée du stage, les stagiaires ont droit aux titres-restaurant et à la prise en charge des frais de transports collectifs pour le trajet « domicile-lieu de stage », dans les mêmes conditions que les salariés de l'organisme d'accueil
Les stagiaires doivent désormais figurer dans le registre unique du personnel, dans une rubrique spécifique afin d’éviter toute confusion avec les salariés.
Congés et autorisations d'absence
Les stagiaires ont désormais droit à des congés et autorisations d'absence d'une durée équivalente à celles prévues en faveur des salariés en cas de grossesse, de paternité ou d'adoption :
- les autorisations d'absence pour suivre les examens médicaux obligatoires au titre de la surveillance de la grossesse et des suites de l'accouchement
- le congé de maternité
- le congé de paternité et d'accueil de l'enfant
- le congé d'adoption
- le congé en vue de l'adoption, en cas d'adoption internationale ou extra-métropolitaine
L’interruption du stage :
Si un stagiaire interrompt son stage en raison d'une maladie, d'un accident, d'une grossesse, d'une paternité ou d'une adoption, l'autorité académique ou l'établissement d'enseignement supérieur peut valider le stage, même s'il n'a pas atteint la durée prévue dans le cursus. Une modalité alternative de la formation peut aussi être proposée…
C’est pareil si le stage a été interrompu, en accord avec l'établissement d'enseignement, du fait du non-respect des dispositions pédagogiques de la convention de stage, ou en cas de rupture de la convention par l'organisme d'accueil.
Dans ces différentes situations, les 3 parties concernées (établissement d'enseignement, stagiaire, organisme d'accueil) peuvent également décider de reporter la période de stage qui n'a pas pu être accomplie.
Titres-restaurant, cantine et frais de transport pour les stages de plus ou de moins de 2 mois
Les stagiaires ont désormais accès au restaurant d'entreprise ou aux titres-restaurant dans les mêmes conditions que les salariés de l'organisme d'accueil. Avant ce n'était pas légalement obligatoire, plutôt un usage.
De plus, les stagiaires ont désormais droit à la prise en charge des abonnements aux transports publics pour le trajet « domicile-lieu de stage » dans les mêmes conditions que les salariés de l'organisme d'accueil : l’obligation de remboursement de 50 % des abonnements aux transports publics (2e classe) ou des abonnements à un service public de location de vélos
Action en requalification du stage en contrat de travail : 1 mois : si un stagiaire saisit le conseil de prud'hommes d'une demande de requalification du stage en contrat de travail, l'affaire est désormais directement portée devant le bureau de jugement, qui statue au fond dans un délai d'un mois suivant la saisine (c. trav. art. L. 1454-5 nouveau).
Le stagiaire qui exerce un recours a ainsi l'assurance d'une justice rapide.
Le régime fiscal des stagiaires : c’est désormais le même régime que les apprentis : la gratification est exonérée d'impôt sur le revenu dans la limite du montant annuel du SMIC. Cette mesure bénéficie directement aux stagiaires ou à leurs parents lorsqu'ils sont rattachés à leur foyer fiscal. Avant, les gratifications des stagiaires étaient exonérées d'impôt sur le revenu sous diverses conditions : caractère obligatoire du stage, durée n'excédant pas 3 mois, etc…
Les stages à l'étranger sont encouragés
Cette loi prévoit expressément que les stages peuvent être effectués à l'étranger, pour favoriser la mobilité internationale. Dans ce cas, les questions relatives au déroulement du stage et à son encadrement doivent faire l'objet d'un échange préalable entre l'établissement d'enseignement, le stagiaire et l'organisme d'accueil.
Lorsqu'un stage est effectué à l'étranger, la convention de stage comporte en annexe une fiche d'information présentant la réglementation du pays d'accueil sur les droits et devoirs du stagiaire.
2 - nouvelles sanctions en cas d’infraction de l’entreprise d’accueil
Lutter contre le recours abusif aux stagiaires
La loi limite le nombre de stagiaires dans l’entreprise sur une même semaine civile. Ce nombre tient compte des effectifs de l’entreprise. Il sera fixé par décret., à priori un quota de 10 % de l’effectif de l’entreprise avec un plafond fixe pour les petites entreprises (3 stagiaires pour un effectif de 30). Par dérogation, selon des conditions fixées par décret, l’autorité académique pourra fixer un autre nombre.
Les manquements sont passibles d'une amende d’un montant de 2.000 euros au plus par stagiaire concerné par le manquement et d'au plus 4.000 euros en cas de récidive dans un délai d'un an.
Obligations de l’entreprise
- elle doit désigner un tuteur chargé de l'accueil du stagiaire et de son accompagnement. Il a également pour mission de s'assurer du respect des aspects pédagogiques de la convention de stage L'organisme d'accueil qui ne désigne pas de tuteur encourt une amende : maximum de 2 000 € par stagiaire, doublée en cas de récidive dans l'année qui suit… Un accord d'entreprise peut préciser les tâches confiées au tuteur et d'éventuelles modalités de valorisation de cette fonction (c. éduc. art. L. 124-9 nouveau). Un décret encadrera le nombre maximal de stagiaires qu'un tuteur peut suivre en même temps. Ainsi, la possibilité d'accueillir des stagiaires sera également liée à la capacité de l'organisme d'accueil à disposer de tuteurs qualifiés en nombre suffisant.
- Suivre le temps de présence : Les stagiaires sont expressément placés sous le régime des règles applicables aux salariés de l'organisme d'accueil en matière de présence de nuit, durées maximales de présences quotidienne et hebdomadaire ; repos quotidien, repos hebdomadaire et jours fériés. Ainsi, l’entreprise a l'obligation d'établir, « selon tous moyens », un décompte des durées de présence du stagiaire.
3 - renforcement de la dimension pédagogique du stage
Pour l'établissement d'enseignement : obligation de désigner un enseignant référent, qui est notamment chargé du suivi du stage et du respect de la convention (c. éduc. art. L. 124-2 nouveau).
À plusieurs reprises durant le stage, l'enseignant référent est tenu de s'assurer de son bon déroulement auprès du tuteur désigné dans l'organisme d'accueil. Si besoin, il peut proposer une redéfinition d'une ou des missions pouvant être accomplies.
Mais aussi….. La faute inexcusable de l’entreprise ! Avant, en cas d'accident du travail dû à une faute inexcusable de l'organisme d'accueil (l’entreprise), c'était à l'établissement d'enseignement de supporter la réparation du préjudice subi par le stagiaire, sans pouvoir se retourner contre l'organisme d'accueil, car le stagiaire n'était pas un salarié de l'organisme d'accueil, mais était placé sous la responsabilité de l'établissement d'enseignement.
Désormais, lorsqu'un stagiaire engage une action en reconnaissance d'une faute inexcusable contre l'établissement d'enseignement, celui-ci est tenu d'appeler en la cause l’entreprise. Le but est qu'il soit statué dans la même instance judiciaire sur la demande du stagiaire et sur la garantie des conséquences financières d'une reconnaissance éventuelle de faute inexcusable. La loi ouvre ainsi la possibilité d'une action récursoire en faveur de l'établissement d'enseignement, afin que l’entreprise supporte les conséquences de sa faute inexcusable….
Lire la loi N° 2014-788 !
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